Huit ans maintenant que le Kakusei avait eu lieu. Huit années à se reconstruire une vie loin de celle des shinobi de la Feuille. Les responsabilités du clan Kitto semblaient lointaines, bien qu’il n’ait jamais vraiment quitté son poste. Le clan s’était séparé pour la sécurité et avait certainement choisi une nouvelle figure. Suivre un homme avec une cible dans le dos aurait été stupide pour eux.
Savait-il ce qu’il advenait de son clan ? Évidemment, il gardait encore quelques contacts fugaces par-ci, par-là. Mais il n’avait plus réellement de poids sur eux. Tout comme les ninja, le clan s’était dissous dans la masse. Sans doute pour le mieux, d’ailleurs.
...
Ouvrant la porte à ce vieil homme, sa présence ne le surprit guère. Akuma, qui s’était présenté sous le nom d’Hanzo, s’était rapproché de la petite famille au fil de ces deux dernières années. D’abord prudent, le Kitto avait légèrement baissé la garde. L’Empire ne venait pas, malgré les années, et l’appartenance de sa femme au clan Uzumaki ne semblait pas avoir attiré plus d’ennuis. Les conseils en jardinage étaient d’un grand secours et Kaede aimait bien ce vieil homme. Mais rien ne l’avait préparé à ce jour.
Un silence froid suivit lorsque le nom de Kotaro fut prononcé. Était-ce réel ? La simple énonciation de ce prénom par cet homme était comparable à un séisme. Toutes ces années balayées par un simple mot.
Le contact du papier contre son torse eut l’effet d’un électrochoc lorsqu’il le prit entre ses mains. La balayant du regard, son cerveau refusait d’assimiler l’information. Son visage était là. L’Empire avait mis sa tête à prix. Mais pourquoi maintenant ? Qu’avait-il fait, mis à part vivre loin de leurs griffes ?
La voix d’Hanzo ne parvenait même plus à ses oreilles, alors que tout son esprit partait en vrille. Comment protéger sa famille ? Elle ne pouvait pas rester ici. Une dénonciation et c’était fini. Même s’il partait seul, ils remonteraient facilement jusqu’ici. Jusqu’à eux...
« Papy Hanzo ! Tu viens jouer avec nous ! »
La petite silhouette de Kaede déboula en courant. Elle tenait un petit panier presque trop lourd pour elle, rempli de légumes et de quelques fruits qu’elle peinait à ne pas faire tomber. Juste derrière, Naoko avançait à pas mesurés, Riku contre elle, serrant sa mère d’une petite main potelée tandis que l’autre agrippait son doudou. La scène aurait eu quelque chose de rassurant, d’ordinaire, si le cœur de Kotaro ne battait pas déjà à tout rompre.
Son regard glissa un instant vers Kaede, puis vers Naoko qui fronçait légèrement les sourcils, comme si elle avait senti que quelque chose n’allait pas. Il inspira profondément.
« Kaede… Va chercher ton frère dans le jardin, d’accord ? »
L’enfant hocha la tête, sans vraiment comprendre, et s’élança aussitôt en direction du potager derrière la maison où Itsuki jouait, déposant le panier aux pieds du vieil homme. Quand ses pas se furent éloignés, Kotaro leva enfin les yeux vers Naoko. Sans un mot, il lui tendit l’affiche.
Le papier trembla légèrement entre ses doigts. Le silence s’alourdit, seulement brisé par un gazouillis de Riku. Dans les yeux de Naoko se refléta soudain la même terreur muette qui venait d’envahir Kotaro : leur vie simple venait de se briser.
« Laisse nous cinq minutes. »
Pouvait-il faire confiance à cet homme ? Il n’avait aucune certitude à ce moment précis. Mais agir vite était le seul choix qu’il avait. Saisir cette main tendue était un risque... mais le Kitto n’avait pas le temps de réfléchir rationnellement. Il devait les protéger avant tout.