Ils n’étaient que peu nombreux à voir le mal-être de la Reine. Tant de têtes étaient tombées face à Chizue sans qu’elle ne verse une larme… et pourtant, parfois, le passé brisait la carapace et perturbait ses émotions. Femme forte depuis trop jeune, elle n’aspirait plus aux mêmes rêves qu’enfant. Aujourd’hui, elle ne faisait que survivre, en tentant maladroitement de faire perdurer l’héritage des siens.
Elle essuya rapidement sa larme avec le mouchoir, puis reprit une respiration maîtrisée. Sa voix, lorsqu’elle se fit entendre, était douce, mais d’une fermeté glacée :
Mais à quel prix ? N’abandonnait-elle pas déjà assez chaque jour de sa vie ? Les mots de Shina résonnaient en elle comme des coups de gong. Durs, mais nécessaires. Elle resta un instant immobile, les yeux rivés sur le ciel en feu, se protégeant derrière l’illusion de ces lumières éphémères. Elle avait raison : elle n’était pas seule, et sa faiblesse ne lui était pas permise. Elle devait devenir plus froide, plus forte, pour que le clan Hattori survive.
Son regard glissa vers sa protectrice, puis revint vers le ciel, où une nouvelle gerbe éclata en pluie argentée.
Je peux trahir un père… mais puis-je trahir une enfant qui croyait encore à ses épaules ?
Un silence pesa. Tout autour, la foule riait, les enfants couraient, des couples se rapprochaient sous les lanternes. Elle, au milieu de cette effervescence, n’était qu’un joyau enfermé dans une cage dorée.
Alors, presque dans un murmure que seule Shina pouvait entendre :
« C’est un mauvais moment. Nous récupérerons nos droits, Shina. »
Ses doigts se refermèrent sur le mouchoir, jusqu’à en froisser le tissu. Ses yeux, rougis par l’émotion, se levèrent une dernière fois vers les éclats lumineux. Kumo n’obéissait pas intégralement, et l’entraînement ninja n’était pas définitivement abandonné, pas plus que l’usage de l’énergie. Tôt ou tard, l’Impératrice reprendrait le contrôle de ses terres. Elle attendrait. Elle choisirait le bon moment.